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Fally Ipupa, l’envol de l’aigle

©droits Réservés
Machine à hits, ses albums sont les plus prolifiques de la scène continentale. De Droit chemin à Formule 7, une carrière déjà prodigieuse gravée dans le marbre. Le récit d’une ascension fulgurante.

Il faut dire qu’à cette époque, le ndombolo ne fait plus tant d’émules et est en nette perte de vitesse sur le continent. Une certaine lassitude s’était emparée des aficionados de ce rythme matrice des sonorités urbaines africaines. Sans doute excédés des musicalités monotones et quasi identiques. L’éclosion d’autres styles musicaux comme l’azonto, et les prémices d’un Afro beat 2.0 titillent la suprématie congolaise, et le pouvoir s’installe allègrement plus à l’ouest. Le coupé décalé et sa myriade de Deejays se sont emparés de la couronne continentale et trônent aux sommets des hits urbains. Toutefois, dès l’écoute des premières notes du titre générique Droit chemin, les férus de seben ont tout de suite flairé la révolution qui se mettait en marche. Les cartes musicales allaient être distribuées et remettre le pays de Kabasele dans l’arène. De sa première grande scène un hiver de 2000 à Bercy avec son patron Koffi Olomidé, à la stature établie au sein de ce groupe pendant presque une décennie, Droit chemin apparaissait comme l’épilogue d’un destin étoilé.

On peut aisément mettre en filigrane le rôle crucial qu’il a joué dans ce nouveau chapitre de la carrière de l’enfant de Bandal. Le producteur ivoirien David Monsoh est loin d’être un novice dans l’écosystème musical africain. L’ancien directeur artistique de Sonodisc avait géré un catalogue impressionnant d’artistes dont Koffi Olomidé, ainsi qu’un groupe de jeunes chanteurs au talent latent qui ne demandait qu’à éclore. Dans cette formation figurait un chanteur redoutable et svelte, Fally ipupa dont l’aura transparaissait déjà. Le duo Monsoh-Fally accouchera sept ans plus tard d’un album savoureux qui connaîtra un plébiscite incontestable tant auprès du public que de la critique. Autant les ndulistes (sorte de puriste de la rumba congolaise) se réconcilient avec les fondamentaux savamment dirigé par un gardien du temple Maika Munan, l’artiste s’est aussi challenger en sortant de sa zone de confort pour livrer des arrangements aux couleurs audacieuses en phase avec la grosse attente du public. Et ce casting exceptionnel avec des caciques de la team Latino ( Fely Tyson, Fofo le collégien, Binda Bass, Titina Al Capone, Modogo Amaranboua, Montana Kamenga…), Benji de Neg Marron, ainsi que le mundélé (Blanc en lingala) faiseur de rumba aux programmations exquises l’incontournable Philipe Guez.

Ses chorégraphies sophistiquées, ses jeux de hanches endiablés, ce style vestimentaire streetwear fashion gangsta impulsé par le styliste Makila Masta en parfaite rupture avec l’extravagance de ces pères. Ce minois qui faisait déjà chavirer le cœur des fans du quartier latin international, et une trentaine de chansons en jachère prête à inonder les ondes. Un package alléchant augurant d’un avenir radieux, autour duquel viendra se greffer une stratégie ambitieuse pour affronter cet écosystème musical si redoutable. Trois albums à succès ( Arsenal de belles mélodies, Power Kosa leka en plus de Droit chemin) et une fin d’union assez tumultueuse, voici ce qu’on retiendra de cette idylle entre le boss d’Obouo Music et son poulain désormais star incontestable. C’est une évidence, David Monsoh tient pour la postérité une place de choix dans ce coup de maître. Même si sa formule a un peu perdu de sa superbe au vue la carrière en demi-teinte de son dernier protégé Héritier Watanabe.

Une stature à pas de géant

Les mastodontes de l’industrie du disque n’ont pas perdu du temps pour l’enrôler. C’est le label Elektra France du géant Warner Music qui a raflé la mise pour un contrat de trois albums. Une ascension fulgurante qui découle d’une organisation millimétrée. Une team tous azimuts chapeautée par l’inamovible manager général Madina Djoboungé, Manon Lubaki la madame Com’, Eddy Madiata un proche s’il en ai qui goupille le marketing et Joe Liyeli le secrétaire général de la fondation Fally Ipupa pour ne citer qu’eux. Une escouade dynamique qui a su créer un environnement optimal de standing international pour mieux brander la marque Ipupa. Un positionnement de choix qui le démarque et qui en fait une personnalité policée, sympathique politiquement correcte et bankable; qui sait se tenir loin des controverses et polémiques puériles qui rythment la vie musicale à Kin.

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Les apparitions de l’artiste sont quasiment des masterclass pour dandys et autres victimes de la mode. Ses réseaux sociaux sont abreuvés de clichés allusifs d’un lifestyle flashy assumé. Pour ce qui est des mondanités, l’auteur d’Amore est une figure du microcosme artistique urbain parisien. Fashion-week, avant-premières, vernissages ou Showcase VIP, il est fréquent d’y croiser sa silhouette. Comme au concert privé de Jay Z à la dernière exposition organisée par la fondation Louis Vuitton en hommage à Michel Basquiat & Andy Warhol, où il figurait parmi le gratin des célébrités mondiales qui y étaient conviées. Somme toute le prolongement d’une stratégie méticuleuse tendant à cultiver l’image glamour qu’il s’est construite.

Auréolé de plusieurs distinctions dont deux disques d’or, il fait partie des artistes africains les plus influents dans le monde avec son concept tout en panache Tokoss, diminutif de Kitoko (bon ou bien dans sa langue maternelle) qui allie bon genre, style chic et bien être. La symbolique d’un art de vie qu’il expose et magnifie à souhait. D’ailleurs deux de ces albums world portent cet apophtegme dorénavant marque estampillé Fally Ipupa. Tokoss 1&2 évoquent les influences afro-Urban. Une mosaïque de couleurs et de sonorités, reflets d’une société africaine ouverte sur de nouveaux horizons tout en restant intégrer à son paradigme culturel initial. Afro beat, Trap décalé, afro trap ou encore l’afro Congo, comme pour s’extirper de l’étiquette du tout pour le ndombolo. Nul doute que la légion congolaise qui alimente le rap en hexagone depuis plus d’une décennie s’inscrit également dans cette dynamique. Celle de pérenniser ce riche héritage, mettre en avant la vitalité de son idiome tout en s’appropriant d’autres rythmes et genres musicaux.

Formule 7 son dernier opus international explore cet univers dans la continuité des précédents. Même si de notre point de vue, les productions rumba bénéficient d’une structuration musicale plus aboutie parce qu’elles transpirent l’expérience authentique des sessions studio live. Qu’à cela ne tienne, les pistes de danse ne désemplissent pas, et les mélomanes s’enivrent à volonté de la musique du Hustler. Un plébiscite implacable validé par ses warriors, inconditionnels de la première heure dont la fidélité ne souffre d’aucune ambiguïté.

Une chose semble évidente, en dépit des antagonismes Fally Ipupa dispose d’une envergure singulière sur l’échiquier musical panafricain, et sa résonance mondiale s’établit allègrement. Du haut de son rayonnement, l’aigle continue de scruter l’horizon avec de l’ambition à en revendre.

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